vendredi 18 décembre 2009

10. Gladio: la guerre secrète des Etats-Unis pour subvertir la démocratie italienne (le dénouement de Gladio)


LE DENOUEMENT DE GLADIO

Un triple meurtre à Peteano près de Venise en mai 1972 s'avéra central dans le dévoilement de Gladio. Le crime eut lieu quand trois carabiniers, en réponse à un coup de téléphone anonyme, allèrent contrôler une voiture suspecte. Quand l'un d'eux ouvrit le capot, tous trois furent déchiquetés par un engin piégé [Scalia, op. cit., p. 11.]. Deux jours plus tard, un appel anonyme impliqua les Brigades rouges, le plus actif des groupes révolutionnaires d'extrême gauche. La police rafla immédiatement pour les interroger 200 communistes présumés, des voleurs et des souteneurs, mais aucune charge ne fut retenue. Dix ans après, un courageux magistrat vénitien, Felice Casson, rouvrit l'affaire depuis longtemps en sommeil, pour apprendre seulement qu'il n'y avait pas eu d'enquête de police sur les lieux. Bien qu'il eût reçu une analyse falsifiée d'un expert en bombes des services secrets et qu'il eût été confronté à de nombreuses obstructions et délais, le juge remonta la trace des explosifs jusqu'à un groupe militant appelé Ordre Nouveau et à l'un de ses membres actifs, Vincenzo Guerra. Il avoua rapidement et fut condamné à vie. Il fut le seul poseur de bombes d'extrême droite jamais emprisonné [Marcella Andreoli, « Che Bomba di Esperto ! », Panorama (Milan), 18 novembre 1990, p. 44.].
Vinciguerra refusa de compromettre d'autres personnes, mais décrivit les faits dissimulés :
« Les carabiniers, le ministère de l'intérieur, les douanes et la brigade financière, les services secrets civils et militaires, tous savaient la vérité cachée derrière ces attaques, que j'étais responsable et tout cela en moins de 20 jours. Ils décidèrent donc, pour des raisons complètement politiques, d'étouffer l'affaire. » [BBC Special, « Gladio, Part II : the Puppeteers », 10 juin 1992.] 
En ce qui concerne ses mobiles, Vinciguerra, fasciste convaincu, dit que son crime était « un acte de révolte contre la manipulation » du néo-fascisme depuis 1945 par toute la structure parallèle basée sur Gladio [Ibid.].
Casson trouva par la suite assez de pièces à conviction pour impliquer les plus hauts officiels du pays. Dans ce qui était la première requête de ce type à un président italien, Casson demanda les explications du président Francesco Cossiga. Mais Casson n'en resta pas là ; il demanda aussi que d'autres officiels balayent devant leur porte. En octobre 1990, sous la pression de Casson, le premier ministre Giulio Andreotti en finit avec 30 ans de dénégations et décrivit Gladio dans le détail. Il ajouta que tous les premiers ministres étaient au courant de Gladio, bien que certains l'eussent ensuite nié [François Vitrani, « Gladio Revelations Put Sword at Heart of Italian Politics », Guardian Weekly (Manchester), 23 décembre 1990, p. 14].
Soudain, les Italiens eurent les clés de nombreux mystères, y compris la mort inexpliquée du pape Jean-Paul Ier en 1978. L'écrivain David Yallop mentionna dans cette affaire comme suspect Gelli, disant qu'il « dirigeait l'Italie à l'époque, pour toutes les questions pratiques. » [David A. Yallop, In God's Name (New York, Bantam, 1984), p. 314.]

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