mardi 24 novembre 2009

10. Mario Moretti et la cache de la via Gradoli



Qui a voulu, et pourquoi, faire découvrir la cache de la via Gradoli où se dissimulait Mario Moretti ? Est-il possible que Barbara Balzerani ait été distraite au point de laisser un balai dans la douche, provoquant une infiltration (excusez le jeu de mots) à l'étage inférieur ? Pourquoi a-t-on immédiatement mis en évidence la découverte de la cache, permettant à Moretti de filer tranquillement ?

Barbara Balzerani a participé au commando qui a enlevé Moro le 16 mars 1978 via Fani : son rôle, bloquer la circulation, en empêchant les véhicules et les passants de survenir sur les lieux du guet-apens.
Pendant l'enlèvement, elle partage avec Mario Moretti le logement du 96 via Gradoli jusqu'au 18 avril 1978, jour du faux communiqué n° 7 où la mort de Moro est annoncée, et de la découverte de la cache.
La cache a été grillée à cause d'une fuite d'eau qui, selon les pompiers, paraît avoir été provoquée délibérément : un balai était appuyé sur la baignoire, et sur le balai quelqu'un avait posé le pommeau de la douche pour que l'eau se dirige vers une fissure dans le mur.
Voici l'interprétation suggestive d'Alberto Franceschini : « Les opérations du lac de la Duchessa et de Gradoli ont toujours été liées. C'est un message identique à l'adresse des ravisseurs de Moro. On leur dit : nous vous tenons, nous pouvons vous prendre à n'importe quel moment. »
Une autre hypothèse est que la cache a été « grillée » par quelqu'un d'opposé à l'assassinat de Moro.
L'état de l'appartement tel que décrit dans les rapports de police semble peu convaincant : des grenades sur le plancher, un tiroir contenant un pistolet-mitrailleur mis en évidence sur le lit, des documents et des tracts partout.
Des doutes aussi sur la gestion tapageuse de la découverte de la cache. Au lieu d'attendre le retour des terroristes pour les arrêter, la nouvelle est rendue publique immédiatement. Mario Moretti, voyant la foule rassemblée autour de l'entrée de son appartement, s'est tranquillement éloigné en scooter. Il s'était sauvé dans des circonstances similaires en une autre occasion. En 1972, via Boiardo. Moretti avait vu Enzo Tortora raconter à la télévision des détails sur la découverte de la prison du peuple. De son propre aveu, il s'était approché de l'appartement, avait demandé ce qui se passait et s'était éloigné. La seule différence, c'est qu'en cette circonstance il avait abandonné la Fiat 500 de sa femme, Amelia Cocchetti, permettant aux forces de l'ordre de remonter à son identité. Dès lors, Moretti est passé à la clandestinité.
En face de la cache des BR, 89 via Gradoli, habitait le sous-officier des carabiniers Arcangelo Montani, agent du SISMI [Servizio per le Informazioni e la Sicurezza Militare]. Ce n'était pas assez. Les services secrets avaient même établi un de leurs bureaux via Gradoli.
De nombreux brigadistes ont souvent défini Balzerani comme une femme particulièrement distraite et Anna Laura Braghetti, la geôlière de Moro, a ajouté que Balzerani oubliait souvent le robinet ouvert.
Avec l'arrestation de Mario Moretti, Barbara Balzerani prend la tête des BR. Après dix ans de militantisme dans les Brigades Rouges, elle est arrêtée à Ostie le 19 juin 1985.
Condamnée à la perpétuité, le tribunal de surveillance de Rome lui a accordé la liberté conditionnelle le 18 décembre 2006 .
Elle est l'auteur du roman Compagna luna et d'un recueil de contes La sirena delle cinque.

Traduit de l'italien par Jules Bonnot de la Bande.

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