lundi 21 novembre 2011

Section américaine de l’Internationale situationniste, Ecrits



Section américaine de l’Internationale situationniste

Internationale situationniste

Numéro un et unique

Précédé de

Adresse aux élèves des écoles publiques de New-York

Post Mortem Ante Facto

            La revue de la section américaine de l’Internationale situationniste, le groupe qui a le mieux exprimé le contenu authentique de la révolution de Mai 68, est le premier ouvrage publié par le CMDE dans la collection Les Réveilleurs de la nuit.
            La section américaine de l’Internationale situationniste, composée de Robert Chasse, Bruce Elwell, Jonathan Horelick et Tony Verlaan, a vu le jour à la fin de l’année 1968.
Les écrits que nous publions ici sont tous inédits en français, et épuisés de longue date en langue anglaise. Le premier de ces documents, Adresse aux élèves des écoles publiques de New-York est un comics détourné, dans la veine inaugurée par les situationnistes. Le second, Post Mortem Ante Facto, une affiche conçue à l’occasion de l’investiture de Nixon, est une critique, aux accents swiftiens, du spectacle de la politique électorale. Le troisième, le numéro unique de la revue de la section américaine, est divisé en cinq sections. « Visages de la récupération » démontre qu’une bonne appréciation des ouvrages des Grandes Têtes Molles de l’intelligentsia américaine, de Marcuse, le docteur en spéculation, à l’escroc McLuhan, est supérieure à ces ouvrages eux-mêmes. « Quelques considérations extraordinaires sur la dégénérescence du capitalisme et la bureaucratisation de l’existence », signé Robert Chasse, expose sous forme de thèses une critique prolétarienne de la bureaucratie et de son projet de pacification de l’existence. « L’aménagement du territoire » (traduction du septième chapitre de La Société du spectacle de Guy Debord) et « Le contrôle de la population » illustrent comment le capitalisme moderne, la société bureaucratique de la consommation, tend à modeler tous les aspects de la vie par les méthodes de l’urbanisme comme de la génétique. « La pratique de la théorie » expose l’activité de la section américaine (la diffusion des textes situationnistes aux États-Unis, l’accueil réservé à La Société du spectacle de Guy Debord et au Traité de savoir-vivre à l’usage des jeunes générations de Raoul Vaneigem, le jeu des situationnistes en mai 68), brosse un portrait de « Cohn-Bendit comme représentation » et formule quelques critiques ad hominem à l’encontre de figures du gauchisme américain dans toutes ses variantes.
Une préface, écrite par le traducteur, retrace l’histoire de la section américaine, en s’appuyant parfois sur des informations inédites, et rappelle les conditions historiques troublées dans lesquelles ses membres déployèrent leur activité séditieuse.
En ce temps de jongleries relatives et de contorsions contingentes, voici des auteurs qu’on ne pourra pas se permettre de supporter, dans la pâte molle du faux intérêt éclectique, comme des Badiou, des Negri, des Zizek. La section américaine de l’Internationale situationniste a su montrer comment l’opposition à l’ordre existant est falsifiée mais aussi redécouverte. À l’heure où apparaît aux États-Unis un vaste mouvement des occupations, dont certains participants s’inspirent ouvertement des situationnistes, on lira attentivement ces écrits. Ils témoignent de ce que fut l’aventure situationniste en Amérique.

vendredi 4 février 2011

Drôle de zèbre!

Le situationnisme d'État

 « Dans un esprit proche de l'Internationale situationniste, il [Daniel Buren] révèle par ses interventions les lieux tout en les critiquant. »
 (Le Petit Robert des noms propres)

jeudi 3 février 2011

Le retour de Charles Fourier

Un article de Philippe Dagen, paru dans le Monde du 25 janvier 2011, évoque l’Hommage à Charles Fourier, dit La Quatrième Pomme, de Franck Scurti – qui semble être à Fourier ce que Buren est à l'Internationale situationniste. Cette commande publique de la Ville de Paris a été placée, boulevard de Clichy, sur le socle qui portait une statue en bronze de Fourier, enlevée par les Nazis en 1942.
Comme le souligne Dagen, rien ne rappelle au passant que ce socle a été de nouveau occupé il y a un moins d’un demi-siècle. Cependant, le critique d'art du Monde donne une singulière version de ce précédent. A l’en croire, « en mai 1968, des étudiants des Beaux-Arts dressèrent une réplique en plâtre de l’œuvre originale et celle-ci fut prestement enlevée par une intervention des CRS. L’affaire est racontée dans le dernier numéro de L’Internationale situationniste. » Certes, mais la notule de l’I.S. « Le retour de Charles Fourier » rend compte de l’affaire en des termes tout autres que ne le fait Dagen.

 
C’est tout d’abord le 10 mars 1969, et non en mai 1968, que la réplique en plâtre de la statue de Charles Fourier fut placée sur son socle. La date erronée que donne Dagen pourrait témoigner d'une confusion avec la petite activité subversive déployée par certains étudiants des Beaux-Arts en mai 68. Or rien dans la notule « Le retour de Charles Fourier » ne permet d’attribuer cette réplique à des étudiants des Beaux-Arts. On y lit plutôt : « Une plaque gravée à la base de la statue en disait l’origine : “En hommage à Charles Fourier, les barricadiers de la rue Gay-Lussac”. ».
On peut lire par ailleurs dans le quatorzième fascicule de l’Encyclopédie des Nuisances que l’auteur de cette réplique était Pierre Lepetit. Surnommé Pierre Le Graveleur, mot-valise rendant hommage à ses qualités de graveur et de lanceur de pierres, Lepetit fut membre du Groupe libertaire de Ménilmontant à la fin des années 60, et du Conseil pour le maintien des occupations en mai 1968. Au style, on devine le voyou (« C’était l’élite : c’était la pègre »). Nous sommes là en présence d’un personnage subversif assez éloigné, selon toute apparence, de l’univers potache des Beaux-Arts.


L’article « La statue de Charles Fourier reparaît pour une nuit place Clichy », paru dans Le Monde daté du 13 mars 1969, attribuait l’opération à un commando d’une vingtaine « d’inconnus » [Note du 30 mars 2011. François de Beaulieu, membre de l'Internationale situationniste, confiera à Christophe Bourseiller: « Voilà un bon souvenir. C'était une statue magnifique, peinte en imitation bronze. Elle était très belle. J'étais dans une équipe en bleu de travail avec une camionnette. Nous étions déguisés en employés de la Ville de Paris. Dans l'opération, il y avait Jacques Le Glou, Christian Sébastiani...» (Archives situationnistes, numéro 3, automne 2003)]. Une quarantaine d’années après, ce même quotidien croit savoir que ces inconnus étaient « des étudiants des Beaux-Arts ». Et voilà comment Le Monde, dont le style est déjà trop difficile pour l’étudiant, est vraiment un journal « objectif » qui reflète l'actualité.
(A suivre.)